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STRESS EN COMPÉTITION : QUELLE GESTION ?

Mise en ligne : 31-03-2020
Dernière mise à jour : 31-03-2020
STRESS EN COMPÉTITION : QUELLE GESTION ?

 

Le stress : qu'est-ce ?

 

Hans SELYE en 1936 le définit comme un syndrôme général d'adaptation aux sollicitations ou agressions, avec trois phases :

  • une réaction d'alarme (activation du système sympathique, disparaissant à l'arrêt de l'agression)
  • une phase de résistance (adaptation de l'organisme à l'agression, si elle se poursuit)
  • une phase d'épuisement (débordement de l'organisme, les mécanismes d'adaptation  «  flanchent » , et ce, même si l'agression a disparu)

Néanmoins le stress n'était alors abordé que sous un aspect purement physiologique, sans prise en compte de l'important volet psychologique...

Depuis, de nombreuses définitions ont été proposées, du Larousse «  état réactionnel de l'organisme soumis à une agresssion brusque " à l'OMS " le stress apparaît chez une personne dont les ressources et stratégies de gestion personnelles sont dépassées par les exigences qui lui sont posées » .

Pour ce qui nous concerne dans cet article, on considérera le stress comme une réaction normale et nécessaire d'adaptation, stimulant la motivation, et permettant la préparation à un évènement quel qu'il soit (une compétition de billard en l'occurence).

Un élément fondamental réside dans la perception dudit évènement, qui est propre à chacun.

Quelques mots de physiopathologie

Une situation « stressante » (tout évènement perçu comme une agression) va déclencher l'activation de trois circuits cérébraux :

1— le premier de ces circuits est le système nerveux central via ses fibres motrices, envoyant des messages aux muscles pour répondre de façon adaptée à l'information sensorielle (on retire sa main si un chien nous mord,  ou si on se brûle sur une plaque)

2— le deuxième circuit activé dans la réponse au stress est le système nerveux autonome (SNA), via les systèmes sympathique et parasympathique.

  • Le sympathique est un système d'urgence qui prépare l'organisme à l'action : augmentation de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle, bronchodilation, et autres effets comme la mydriase (dilatation pupillaire), le ralentissement du transit intestinal, les tremblements...  Tout concourt  à faciliter l'apport de sang (donc d'oxygène) dans les muscles, à préparer au « combat » (la mydriase aide à la perception du danger par exemple !)
  • Le parasympathique a les effets inverses et réduit les effets « délétères » du sympathique une fois le stress passé. Pour schématiser, le parasympathique est un système se déclenchant dans des situations de « repli sur soi » hors de tout stress : exemple la défécation, la miction, la méditation.

3— le troisième circuit est le circuit neuroendocrine, qui permet la libération d'hormones dans le sang. L'activation sympathique provoque la libération d'adrénaline par la médullo-surrénale, la sécrétion entre autre d'une hormone hypothalamique, la CRF qui provoque in fine une libération de corticoïdes par la glande surrénale.

En fait, le point de départ de ces réactions diverses est une émotion. Une situation particulière sera perçue différemment selon chacun, mais c'est toujours la même partie du cerveau, l'amygdale, qui reçoit les informations d'ordre émotionnel et enclenchera la cascade de réactions décrite plus haut, via le système nerveux de l'individu.

On comprend donc aisément que l'activation sympathique à l'excès ‒dont un des effets les plus visibles chez le joueur de billard est le tremblement‒ soit particulièrement délétère dans notre sport.

Partant de là on pourrait dire qu'il existe deux sortes de stress :

  • un positif, qui stimule la motivation, permet de se préparer à la tâche
  • un négatif qui paralyse et nuit au fonctionnement, néfaste dès lors qu'il se prolonge.

 

Le stress de la compétition pourquoi ?

Ainsi que signalé plus haut, ce qui importe n'est pas tant le « danger » en lui même, que notre représentation du danger. D'ailleurs où est le danger à jouer une compétition de billard ?  Posons la question à n'importe qui (non joueur de billard bien sûr), il n'en comprendra pas le sens.

Une compétition sportive peut se définir comme l'action visant à obtenir en même temps que d'autres, la même victoire, le même titre.

La compétition, dans un sens plus général, fait partie de notre vie, est inhérente à celle-ci, et est un important moteur de croissance. Elle est toujours chargée d'émotion. Elle contribue à la création de nouvelles ressources, nous fait chercher à exceller. Elle est une façon de concrétiser le désir d'épanouissement de tout humain, vise à le tirer vers le haut, voire à lui faire dépasser ses limites.

La compétition est-elle une mise en danger ?

Nous qui nous livrons, parfois corps et âme, à ce jeu magnifique, à ce sport authentique, qui fait partie intégrante de notre vie, nous savons tous où est ce « danger » , combien les matches ont d'enjeu,  simplement parce qu'il ne faut pas perdre.

Pour le professionnel, perdre c'est peut-être amputer ses revenus financiers, sa crédibilité d'enseignant, décevoir ses admirateurs, amoindrir son estime de soi... et on comprend vite tout l'enjeu des compétitions à ce niveau. Mais pour l'immense majorité des joueurs, non professionnels, l'enjeu, bien que très différent, n'en a pas moins de valeur aux yeux de chacun. On ne veut pas perdre, car on aimerait monter de catégorie, participer à une finale nationale, et il faut gagner ce dernier match de ligue. Ou encore notre adversaire n'est pas de ceux qu'on apprécie le plus...

Ce ne sont pas les raisons qui manquent, chacun trouvera les siennes, personnelles, et l'on comprend bien que c'est toujours la représentation que nous nous faisons d'un évènement qui lui confère son importance, et le charge donc d'émotion.

La gestion du stress en compétition

Elle sera toujours propre à chacun, dépendra de notre bon vouloir à l'améliorer et se développera au fil du temps. Nous proposerons, dans les lignes qui suivent, quelques pistes de réflexion pour amener le joueur, le compétiteur donc, à subir le moins possible les effets d'un stress délétère sur son jeu en compétition.

Une compétition se prépare, longtemps à l'avance ‒tout sportif le sait‒ et ce d'autant que le niveau d'exigence de la compétition est élevé (on ne décide pas une semaine avant l'évènement d'aller courir un marathon).

La préparation psychologique : elle est indispensable et pourrait faire se poser au compétiteur quelques questions simples :

Qui suis-je ?  le compétiteur qui se connaitra bien sur différents plans (confiance en soi, motivation, combativité), qui aura donc passé du temps à réfléchir sur lui et à anticiper des situations, y trouvera toujours bénéfice.

Quels sont mes objectifs ?

     — Externes : la performance sur le papier, le résultat (exemple je veux me qualifier pour le championnat de Ligue, je veux faire plus de 10 à la partie libre, je veux monter sur 3,10m)

    — Internes : le « flow » , qui devrait être un objectif pour tout joueur. Il s'agit d'un état physique et psychologique de performance optimale, où le sportif est extrêmement à l'aise dans son activité, où tout déroule, coule de source, se met en place, sans effort. Le doute n'a plus de place, il s'agit d'un moment de haute performance (rapporté au niveau de chacun) que l'on pourrait qualifier par les termes suivants :

  • facilité
  • bien-être
  • contrôle

 Quels moyens vais-je employer pour atteindre mes objectifs ?

    — Mise à disposition de temps d'entraînement réaliste

    — Élaboration d'un programme d'entraînement précis

    — Préparation mentale : elle vise des objectifs de comportement plus que de résultat, mais participera à ces derniers indéniablement.

           • la sophrologie, dont l'objectif est d'atteindre un équilibre entre émotions, pensées et comportement. Elle permet de développer des dispositions, des ressources que chacun possède pour accroître les capacités d'adaptation à la vie.

            • les techniques de relaxation : ce sont des pratiques entrant dans le cadre des médecines  « douces » et qui sont un moyen d'entrer dans un état de détente, par le biais d'un travail sur la respiration, sur la prise de conscience et le relâchement de toutes les parties du corps. Pratiquée régulièrement, elle apprend à être à l'écoute de soi, de ses ressentis et de son mental. Elle permet de gérer ses émotions et amoindrit les effets du stress négatif. Quelques exemples de technique de relaxation :

  • progressive de Jacobson
  • training autogène
  • hypnose
  • yoga

 

La préparation physique :

mens sana in corpore sano (pour ceux qui n'auraient pas étudié le grec, ça signifie « un esprit sain dans un corps sain » , pour ceux qui diront mais c'est du latin pas du grec, ils auront raison).

Nous évoquons depuis le début de cet article l'importance de l'activité mentale au cours de la compétition. Une bonne forme physique ne pourra que la renforcer. La pratique d'une activité physique régulière (compatible avec ses possibilités physiologiques) sera toujours un plus si pratiquée régulièrement, en évitant les efforts physiques violents les jours précédant la compétition de billard. Le bien-être corporel que procure une activité physique régulière renforce indéniablement la confiance en soi et diminue le stress.

Une nutrition équilibrée et un temps de sommeil suffisant participent là encore à la réalisation des objectifs fixés (1)*.

L'attitude en competition :

  • La routine

L'idée générale d'établir une « routine » , terme proposé par Xavier Grétillat dans son ouvrage que je conseille à tous, est fort intéressante.

On peut réfléchir à l'avance à un rituel, un mode de fonctionnement, que chacun devra trouver, qui lui sera propre. Mais pourquoi donc ?

Pour une raison très simple : l'être humain est pétri d'habitudes car ce qui est connu ne fait pas peur. Ce qui n'est pas connu, au minimum fera poser question, au maximum fera mettre en jeu des ressources psychologiques plus ou moins intenses pour s'adapter à la situation : c'est un stress.

La compétition véhicule bon nombre d'inconnues, aussi chaque inconnue écartée sera un avantage. Une routine vise à ne pas laisser place (ou le moins possible) à l'imprévu, donc l'inconnu. Elle rassure.

Un rituel pourrait démarrer la veille de la compétition, par le choix d'un hébergement particulier, d'une tenue vestimentaire précise (réglementaire bien sûr !) ou un type de repas. À chacun de trouver le sien.

La routine peut aussi concerner votre période d'échauffement, ou plutôt de test du billard.

  • La posture : durant le match, le joueur se trouvera (au moins une fois) à 2 emplacements différents

1) La chaise (2)*: vous y êtes car c'est l'autre qui commence, ou parce que vous venez de terminer vos 74 points sur mouche, à la libre ou au cadre, ou encore à la bande si vous vous appellez Pichenaud.

On est assis bien droit, les épaules relâchées, l'expression du visage la plus neutre possible. On n'est pas des joueurs de poker, mais il n'est jamais utile de donner à votre adversaire, une quelconque indication sur votre état psychologique. A ce propos, si venant de rater un point facile vous retournez vous asseoir, ne laissez rien paraitre de votre agacement, ca ne peut que galvaniser votre adversaire !

La respiration : elle est très importante, voire fondamentale. On s'astreint à respirer lentement, calmement, comme on l'a appris au cours des mois (ou des années) précédent(e)s dans ses exercices de relaxation.

2) À la table : (parce que c'est vous qui commencez, ou parce que l'autre va s'asseoir après sa série de 74 !)

                                              On garde une attitude tonique, préparée sur la chaise, qui aidera à être concentré, appliqué et objectif, tout en laissant une part au ressenti du moment, du point.

                                    La respiration reste contrôlée.

Tous ces éléments, ces « modes opératoires » , ont pour but d'apporter de la confiance en ce que l'on fait, de la sérennité, de la maitrise, avec pour corollaire d'abaisser son niveau de stress.     

En conclusion, la gestion du stress en compétition, si elle s'appuie sur des éléments communs (préparation technique, mentale et physique), reste une approche individuelle. Nous sommes tous uniques et différents.

C'est notre part d'engagement et de motivation personnelle qui nous permettra de « limiter la casse » face au toujours difficile abord d'une compétition, à quelque niveau que ce soit, en se rappelant que, plus l'enjeu est important (compétition nationale voire internationale), plus le stress sera présent.

Mais rappelez vous toujours que nous autres amateurs —plus ou moins éclairés, certes— ne faisons que jouer au billard et qu'il y a plus grave dans la vie que de perdre un match...

 

Michel Pailler,

membre de la Commission médicale nationale

 

(1)*article du Dr Pedro de Roa http://www.ffbillard.com/articles/la-condition-physique-du-joueur-1333.html)

 (2)* " une partie se gagne sur la chaise "   Pierre Soumagne (entre autres, peut-être ...)

 

  • merci au Dr Isabelle Zizine et à Xavier Grétillat (dont je recommande encore chaudement l'ouvrage) pour l'inspiration qu'ils ont pu me fournir à l'écriture de cet article.

 

                              

 

 

 

 

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